Cameroun : Paul Biya à l’épreuve de la sagesse

Paul Biya et Peter Henry BarlerinPaul Biya et Peter Henry Barlerin
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Le doyen président camerounais Paul Biya serait-il devenu un contre modèle de la sagesse qu’il est supposé incarner ? En tout cas la question ne fait plus mystère auprès d’une certaine opinion dans les salons feutrés au regard de la tournure que prennent les événements dans la partie anglophone du pays secouée par une vague séparatiste depuis presque deux ans.

Au-delà des mots, le pouvoir de Yaoundé a-t-il pu cerner le vrai message que lui a récemment adressé Peter Henry Barlerin, l’ambassadeur américain en poste au Cameroun, lorsqu’il a déclaré : « J’ai invité le président Biya de mettre en œuvre son leadership pour encourager un rapprochement des positions entre les deux parties ». Rien n’est moins sûr !

Ce que l’on sait de façon assez claire est que dès les tout premiers instants de la manifestation de ce conflit, il semble que c’est la ligne dure qui a été choisie par le pouvoir de Yaoundé comme réponse pour étouffer les velléités frondeuses des séparatistes anglophones.

Etait-ce la meilleure voie  pour sortir de ce traquenard surtout de la part d’un doyen de qui l’on serait en droit d’attendre plus qu’une question de bon sens, sagesse, distance et sens de mesure ? La réponse n’est pas à chercher loin.

Il n’y a qu’à regarder le bilan macabre de cette approche répressive et comment la situation  s’est-elle détériorée en deux ans par rapport au choix de la manière forte privilégiée par le pouvoir en place.

Au moins 120 civils et 43 membres des forces  de sécurité ont perdu la vie depuis 2016. Rien ne se sait sur les pertes du côté des séparatistes.

Une politique va-t-en-guerre qui n’a fait que radicaliser les positions de part et d’autre et éloigner toute lueur d’apaisement pour sortir de cet infernal bourbier.

Du coup, aujourd’hui, l’on se rend sans doute à l’évidence que le cycle de violences presque sans fin que vivent les populations dans les régions nord du Cameroun est la conséquence directe du mauvais choix que le pouvoir a eu à faire.

A la violence imposée par les autorités de Yaoundé, les activistes des régions nord anglophones ont répondu par les représailles tout aussi dévastatrices.

Campant sur leurs positions, les autorités continuent d’accumuler les assassinats et imposent la terreur par des arrestations et détentions arbitraires sans accès à la justice, à la famille ni aux services de la Croix-Rouge.

Réponse du berger à la bergère, les séparatistes s’attaquent aux symboles de l’Etat dont des postes de police, gendarmerie et commissariats ainsi que des écoles qui sont incendiés. Les meurtres des gendarmes et enlèvements des fonctionnaires francophones qui sont kidnappés  sont aussi fréquents. Voilà ce à quoi peut nous amener le manque de sagesse.

Pire encore quand cela est le fait de quelqu’un comme Paul Biya qui trône au siège du doyen des chefs d’Etat depuis que l’inusable Robert Mugabe a été mis à l’écart, la déception est sans commune mesure !

Tout compte fait, au moment où le Cameroun célèbre sa fête nationale ce 20 mai qui coïncide avec la fête de Pentecôte, la prière de tous les chrétiens est que le Saint-Esprit descende sur le doyen. Il en a besoin. Surtout à quelques mois de l’élection présidentielle dans ce pays d’Afrique centrale, la logique voudrait que Paul Biya s’interroge sur son avenir et surtout la nature de l’héritage politique qu’il entend laisser aux Camerounais.

Voudrait-il léguer à la postérité un Cameroun déchiré et à genou ou un Cameroun apaisé, soudé, debout et  fort ? C’est une question de sagesse !

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William Tambwe
William Tambwe, chroniqueur et éditorialiste pour Africtelegraph.

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