Sénégal : Actualiser le code des télécommunications

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La décision d’actualiser le code des télécommunications de 2011 a été prise en 2015 par le ministère des postes et des télécommunications du Sénégal. Le premier acte fut posé en Janvier 2016, le consultant sélectionné en Juillet 2016, le lancement du projet en Février 2017, présentation de l’avant-projet de communications électroniques en Avril 2017 et le projet révisé, a été partagé en Mai 2017.

ASUTIC compte faire à partir d’aujourd’hui des notes de décryptage sur ce projet afin de fournir aux citoyens un socle nécessaire à son sens critique et à ses engagements en plaçant les intérêts du Sénégal au cœur de ses réflexions dans une approche systémique. L’objectif de l’analyse est la vérification qui permet de mettre au jour les écarts, les manquements, les restrictions, les imprécisions aux fins de formuler des recommandations. A ce titre, nous analyserons d’abord la méthodologie et ensuite l’impact du code sur l’utilisateur final, la concurrence, la sécurité, le service universel et enfin la régulation.

Tout d’abord le recrutement du consultant suite à un appel à manifestation d’intérêt soulève des interrogations et la question de son opportunité se pose. Pourquoi utiliser 74,5 millions du contribuable sénégalais pour payer des consultants quand l’expertise locale, en mesure d’assurer cette mission¬ est disponible? Pour rappel le code des télécoms de 2011 a été élaboré par des sénégalais. L’article 18 du code de 2011 brandi par le ministère pour se justifier, ne contient aucune clause qui lui impose de recruter un consultant pour la mission d’actualisation du code. En plus, il n’existe pas de texte qui interdit à un ministère de travailler avec les fils de ce pays (expertise locale) comme ce fut le cas en 2011. Par conséquent cette dépense de l’argent du contribuable sénégalais est injustifiée et inopportune.

La gestion optimale des maigres ressources budgétaires et une mise à jour du code qui préserve les intérêts du Sénégal, n’étant pas au cœur de cette mission, le recrutement d’un consultant s’avère indispensable pour le ministère des postes et télécommunications du Sénégal. En effet, avec le consultant, le ministère obtient ce qu’il demande, pas nécessairement ce dont il a besoin pour développer le secteur des télécoms. Ainsi, le Ministère a obtenu le projet de code de communications électroniques souhaité.

Depuis l’atelier de lancement du projet, le ministère a initié une consultation publique d’abords par un mailing liste, ensuite par un questionnaire envoyé aux acteurs identifiés et enfin par la mise en place d’un comité technique. En fait, il s’agit d’une consultation restreinte par internet. Quant au comité technique, il n’a pas de termes de référence donc pas d’objectifs, de résultats attendus encore moins ¬une définition claire de son fonctionnement, sa composition et sa durée de vie. Toute¬ la collaboration se fait ainsi dans un cadre informel avec des réunions sans ordre du jour et des comptes rendus loin d’être fidèles.

A l’issue de l’atelier de présentation de l’avant-projet du code, seuls 15 jours ont été accordés aux acteurs pour faire leurs observations et contributions sur un document de 100 pages contenant 278 articles, en sus des 167 pages du tableau comparatif du consultant. Pendant ce temps le consultant a travaillé pendant 10 mois et le ministère a eu 18 mois pour faire le même travail. L’ASUTIC a porté à l’attention du ministre des postes et télécommunications, les manquements et dysfonctionnements constatés par courrier en date du 05 mai 2017.

Malgré ce délai très court, l’ASUTIC a proposé la modification de 28 articles, 2 chapitres, l’insertion de chapitres sur les contrats (5 articles), sur les contrats à distance (9 articles), sur les actions des Associations des Utilisateurs dans l’intérêt des utilisateurs (3 articles). Au total, 47 propositions. Enfin, elle a formulé des questions pour mieux comprendre certaines dispositions du projet de code. Elle n’a reçu aucune réponse et seule une proposition a été prise totalement en compte et deux en partie.

Les articles du projet de code sont ainsi le fruit d’arbitrages propres au ministère et de son consultant, et ne reflètent pas nécessairement le contenu des contributions de la consultation. Le ministère n’est donc pas allé jusqu’au bout de sa démarche inclusive et participative : recueillir des avis, des contributions, mettre en place une pondération, créer une méthodologie de validation pour déterminer quelles propositions étaient les plus pertinentes, les plus innovantes. En lieu et place, on assiste à une parodie de consultation.

Au final, ce projet de code sera publiquement présenté par le ministère comme le fruit d’une large concertation, qui a duré plusieurs mois et qui s’est faite par le biais d’une consultation en ligne mais également d’ateliers contributifs. La même démarche fut adoptée avec la stratégie «¬Sénégal numérique 2016-2025¬» malgré les nombreuses réserves sur ses limites et insuffisances.

La loi étant l’expression de la volonté du peuple sénégalais, ASUTIC considère que l’expertise nécessaire à l’élaboration d’un nouveau code de télécommunications dépasse largement le cadre des « experts et consultants» et qu’il est important de puiser ses idées et son sens critique dans différentes strates de la société. Par conséquent, ASUTIC estime qu’on ne devrait pas laisser à quelques spécialistes la charge de déterminer les axes d’un code des télécommunications, destiné à être celui du Sénégal tout entier.

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Mapote Gaye
Mapote Gaye journaliste Sénégalais Consultant. Formateur en communication, Marketing et Management

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