Le président Pierre Nkurunziza va continuer à occuper ses fonctions jusqu’en 2034. Les Burundais lui ont renforcé ce pouvoir absolu en votant jeudi massivement la vaste révision constitutionnelle.
Plus de 4 millions d’électeurs ont afflué tôt le matin les bureaux de vote pour s’exprimer par référendum sur la réforme qui consacre définitivement la dérive totalitaire du pouvoir observée ces trois dernières années.
Le contraire aurait étonnait car bon nombre d’électeurs burundais avaient déjà reçu les consignes de se présenter très tôt dans les bureaux de vote avant d’aller dans les travaux de champ. Pierre Nkurunziza a lui-même montré l’exemple en votant le matin. En l’absence des observateurs, les Burundais n’ont pas eu des difficultés à remplir leur bulletin sur lequel on ne pouvait lire qu’une seule mention « référendum constitutionnel de la République du Burundi de mai 2018 », avec les cases oui et non (« Ego » et « Oya », en kirundi). Il n’y a pas aussi d’incidents majeurs sur l’ensemble du territoire par crainte de subir des représailles.
Pour le oui, il y a eu à l’aube de longues files d’attente de personnes qui étaient impatientes de voter pour consolider l’indépendance et la souveraineté de leur pays. Un cadre du parti au pouvoir, le CNDD-FDD a affirmé que les Burundais ont voté en toute liberté et avec enthousiasme sans que les voix discordantes ne soient étouffées. Cette révision de la Constitution autorise Nkurunziza, 54 ans et au pouvoir depuis 2005, à briguer deux mandats de sept ans à partir de 2020. Le nouveau texte vise surtout à entériner la mainmise totale sur les institutions du CNDD-FDD et à concentrer encore plus le pouvoir exécutif dans les mains du président Nkurunziza.
Toutefois, il faut souligner que les organisations de défense des droits de l’homme ont dénoncé lors de la campagne référendaire les cas d’enlèvements, des meurtres et des arrestations arbitraires ainsi que l’absence de réel débat démocratique. Le processus n’a réuni aucun des critères permettant de garantir sa crédibilité. Il a été ponctué d’injonctions, de menaces, d’intimidations et de répressions, a déploré Tchérina Jerolon, responsable adjointe du bureau Afrique de la Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH).
Le projet de révision a été condamné par la communauté internationale, dont l’Union européenne, premier donateur de ce pays, l’un des plus pauvres au monde, les États-Unis et l’Union africaine. Mais ces critiques n’ont pas suffi à infléchir la position du régime burundais. Les partis d’opposition intérieurs et la coalition d’indépendants Amizero y’Abarundi (Espoir des Burundais) appellent à voter non, craignant des représailles s’ils se prononçaient en faveur de l’abstention, plus que tout redoutée par les autorités.