Homme d’affaires togolais, Jonathan Fiawoo fait partie des voix qui comptent sur le continent africain. Dirigeant et administrateur d’entreprises, ancien Président de la Chambre de Commerce, il porte une attention toute particulière aux enjeux de développement pour l’Afrique sub-saharienne. Ses participations dans des secteurs variés de l’économie (tourisme, transports, énergie, environnement…) ont amené Jonathan Fiawoo à développer une vision d’ensemble de la situation du Togo et du sous-continent dans son ensemble.
Quels sont selon vous les principaux challenges auxquels doit faire face l’Afrique sub-saharienne ?
Jonathan Fiawoo : Je pense tout d’abord que l’enjeu central est la scolarisation des jeunes. J’entends par là, une scolarisation de qualité, jusqu’aux niveaux supérieurs. Sous la pression des bailleurs financiers, il y a une focalisation excessive sur l’universalisation de l’école élémentaire. C’est bien entendu une nécessité absolue ! Mais cela ne suffira pas. Nos pays doivent donner à leurs jeunes la possibilité de bâtir des parcours scolaires ambitieux, jusqu’aux niveaux des Masters. C’est ce niveau qui est nécessaire pour profiter (et générer) de la croissance.
Par ailleurs, et j’ai déjà eu l’occasion de développer ce point récemment. Je pense que la transition énergétique est à la fois un énorme challenge (car nos économies ont soif d’énergie) et une immense opportunité. Il faut prendre la mesure du potentiel qui existe en la matière en Afrique. Et effectuer collectivement un saut qualitatif.
Vous semblez très optimiste au sujet des perspectives d’avenir ?
Je voudrais surtout participer à corriger une perception erronée du continent. Au-delà du débat un peu factice entre afro-pessimistes et afro-optimistes, il subsiste trop souvent une vision caricaturale ou manichéenne. On parlait encore tout récemment dans la presse de « continent low-cost » et je crois que c’est un grand risque.
Pourtant, « continent low-cost » veut dire continent « attractif »…
Certainement, et je me réjouis de voir de grandes marques européennes du textile, par exemple, investir massivement en Ethiopie ou ailleurs. En revanche, je ne me résous pas à voir l’Afrique simplement supplanter la Chine comme « atelier du monde », au seul motif que les salaires y sont jusqu’à dix fois inférieurs à ceux des chinois. Je crois possible d’inventer un modèle de développement plus respectueux de nos ressources, et dont l’originalité tiendrait à la capacité à éviter les écueils « classiques » du développement.
Pour finir, comment évaluez-vous le marché africain pour les entreprises occidentales souhaitant s’y implanter ?
Je ne crois pas, pour ma part, que l’on puisse parler de « marché africain ». En réalité, l’Afrique comprend 54 marchés (voire plus !), très segmentés, avec de nombreuses barrières de tous ordres. Par exemple, les géants du web adoptent des stratégies différenciées selon le niveau de connexion des pays : Facebook investit massivement au Nigeria et au Kenya, parce que les deux son matures de ce point de vue. Les investisseurs doivent apprécier les potentiels au cas par cas.