Gabon : Pierre Dickson Anguinga tacle Alfred Bongo Ondimba

Pierre Dickson AnguingaPierre Dickson Anguinga
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Dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé, le président par intérim de la Fédération gabonaise de boxe, Pierre Dickson Anguinga, explique qu’Alfred Bongo Ondimba et ses nouveaux collaborateurs, ont commis trop de gaffes. L’homme détaille également sa mission d’intérimaire.

A quand remonte votre prise de pouvoir, Pierre Dickson Anguinga ?

Ma prise de pouvoir remonte au 12 mai 2018. Je suis un ancien dirigeant de la fédération, j’ai beaucoup appris pendant  pratiquement 12 ans, auprès du président Sossa Simawango Clément, devenu aujourd’hui président de la Confédération africaine de boxe (CAB). Je pense que j’ai pu acquérir auprès de lui une expertise suffisante pour pouvoir diriger la fédération gabonaise de boxe aujourd’hui.

Qui a fomenté la crise qui vous a placé à la tête de la Fégaboxe ?

La crise a commencé par la grogne des présidents de ligues provinciales qui ont constaté   un certain nombre de dysfonctionnements et de manquements. Il y a eu trop de violations des dispositions statutaires. L’article 63 de nos statuts stipule pourtant que le président de la Fégaboxe est le garant des statuts. Mais lorsque ce dernier a commencé à les violer, la famille de la boxe gabonaise est montée au créneau. Et de toutes les promesses faites par le bureau d’Alfred Bongo Ondimba aux présidents de ligue, aucune n’a été respectée.

Quelles sont les dispositions statutaires qui ont été violées ?

Le président destitué a commis trop de gaffes. Il n’a pas daigné organiser l’assemblée générale ordinaire qui est statutaire depuis un an, alors qu’il a été élu en mars 2017. Il a changé le logo de la Fégaboxe, la devise et le sigle de la fédération,  à deux reprises. On ne change pas ces dispositions statutaires comme on veut, sans informer l’assemblée générale. La fédération n’est pas la cour du roi Pétaud. Le président destitué a également délocalisé le siège fédéral, sans en informer la tutelle ni l’assemblée générale. Or nous étions l’une des rares fédérations à être propriétaires d’un siège.  Ce siège historique a vu l’éclosion de plusieurs légendes de notre boxe. Ce siège, dans l’abandon total deviendra bientôt  un repère de squatters puisque tout ce qui a été mis en place par le bureau sortant dans ce siège a été éventré. C’est tout ce désordre qui a poussé les ligues à mettre en place la procédure de destitution.

Quel est l’article qui a autorisé les présidents de ligue à destituer Alfred Bongo Ondimba ?

Les articles 13 (pour le garant des statuts) et 63 (pour la dissolution) de nos statuts disent : lorsque des dysfonctionnements sont observés, les présidents de ligues convoquent une assemblée générale extraordinaire. Cette assemblée générale a pour mission d’entendre le président sur les griefs qui lui sont reprochés. Mais le président déchu, Alfred Bongo ondimba été bel et bien convoqué mais il ne s’est pas présenté. Alors les présidents de ligue sont passés à la deuxième étape. Ils ont convoqué une seconde assemblée générale extraordinaire, qui l’a destitué. Les deux assemblées ont eu lieu le 30 mars et le 12 mai 2018.

La fédération n’a pas d’argent. Ne courez-vous pas vers un nouvel enlisement de la Fégaboxe ?

Non, je souligne que la fédération, sans compétition depuis plus d’un an était déjà morte. On ne va pas encourager cette léthargie. Notre mission principale est de préparer et organiser la prochaine élection à la tête de la fédération. Mais avant cette échéance, nous n’allons pas croiser les doigts. Dans la gestion des affaires courantes nous allons rapidement lancer les compétitions. Nous allons organiser le championnat national car nous n’avons plus d’équipe nationale. C’est une aberration. Si on est aujourd’hui sollicité pour une compétition internationale, on ira avec quel boxeur ? Or c’est le championnat national qui détermine la liste de nos représentants.

Le ministère en charge des sports a-t-il validé votre prise de commandement ?

Le ministère observe simplement. Il a des missions précises. Il a pris acte de notre démarche. Et c’est ce 23 mai 2018 que nous avons remis au ministère le procès-verbal qui sanctionne les travaux de l’assemblée générale. Le conseiller juridique du ministre va simplement vérifier si la procédure de destitution a été respectée.

Le prochain président élu de la Fégaboxe va-t-il réhabiliter les anciens logos, devise et sigles de la fédération qui ont fait les beaux jours du noble art gabonais?

Cela va de soi. Un sigle ne se change pas à la volonté du seul président. Les logos et le sigle traditionnels de la Fégaboxe sont connus par le monde entier. Ils vont revenir. Il n’y a pas eu d’assemblée générale pour les modifier. Même le ministère a été surpris de constater le changement de logo et du sigle de la Fégaboxe, deux fois en l’espace de trois mois.

Les indisciplinés de la Fégaboxe qui sont devenus les acolytes d’Alfred Bongo ne l’ont-ils pas poussé à de telles bévues, avec des conseils aberrants ?

Je n’en sais rien. Je croyais que ces indisciplinés, qui font l’objet de plusieurs sanctions de la CAB et de la Fégaboxe, aimaient la boxe, qu’ils avaient un peu de bon sens. Mais je me rends compte qu’ils ne maîtrisent rien du tout. Ils ne savent pas de quoi il s’agit. Si l’ex-président Alfred Bongo Ondimba s’était entouré des personnes compétentes, il n’aurait pas commis toutes ces gaffes. Je constate que ces malveillants récidivistes ont volontairement induit Alfred Bongo en erreur.

Cependant pourquoi le bureau déchu continue d’installer certaines ligues provinciales en catimini ?

C’est de l’ignorance plurale de la part des auteurs de ce renouvellement illégal. Nous ne comprenons pas qu’un bureau déchu puisse continuer à installer des ligues fictives dans des maisons  privées au mépris des statuts. Ces comportements déplorables ne font qu’aggraver leur situation.

Le président déchu est quand même un notaire. Comment expliquez-vous ces manquements ?

Voyez mon étonnement. Je ne comprends pas qu’en tant que juriste, il n’a pas pu lire les statuts de la Fégaboxe. Son élection avait déjà souffert de beaucoup de contestations. J’avais dit que son élection était une forfaiture. Alfred ne remplissait pas les critères pour être président de la Fégaboxe. Le Comité national olympique a refusé de reconnaître ce bureau, deux semaines après le scrutin. Pour un professionnel du droit, il est étonnant qu’il ait encore persévéré dans cette logique de violation des statuts.

On dit que vous n’avez pas d’argent car vous êtes un simple cadre municipal. Comment comptez-vous alors diriger la Fégaboxe ?

Les moyens financiers viennent après. Ce sont les idées qui prévalent. Et les moyens on les cherche et on peut les trouver. Il y a des mécènes et des sponsors en sport. Il y a des mécanismes pour les avoir. Je vous le rappelle, Alfred Bongo Ondimba a pourtant beaucoup d’argent, nous le supposons, mais il a fait un an sans compétition nationale. Et il n’a tenu aucune promesse.

On aurait appris que le DTN maître Dieudonné Méfaghe, a été évincé par Alfred Bongo Ondimba par une simple notification verbale, alors qu’il a été nommé en conseil des ministres. Qu’en est-il exactement ?

C’est encore l’une des preuves de l’amateurisme de ce bureau. On ne destitue pas un Directeur technique national sans se référer au ministère en charge des sports. Pour notre part, nous reconnaissons Dieudonné Mefaghe comme DTN puisqu’il est le seul détenteur de tous les diplômes requis pour occuper cette fonction.

Savez-vous pourquoi le 1er vice-président et le secrétaire général du bureau d’Alfred Bongo ont démissionné ?

Ayant lu minutieusement leur lettre de démission reçues par le canal des présidents des ligues, selon le premier cité, Clément Tsamounou, Alfred Bongo l’a rétrogradé au mépris des statuts, au rang de 2ème vice-président le 5 mars 2018, alors qu’il a été élu 1er vice-président pour quatre ans. Il a déclaré qu’il ne saurait fonctionner dans l’illégalité en acceptant le titre de 2ème vice-président qui n’a pas été entériné par une assemblée générale. Quant à Paul Ilengou, il a estimé que son éthique ne saurait s’accommoder de certaines pratiques du bureau dirigé par Alfred Bongo. Et par ricochet soucieux de respecter les statuts de la Fégaboxe, l’intéressé n’a pas voulu soutenir l’illégalité incarnée par le bureau sortant. Toutes ces démissions des plus proches collaborateurs d’Alfred Bongo,  viennent confirmer qu’il y a effectivement eu problème et que la destitution est fondée.

La boxe gabonaise est-elle par terre aujourd’hui ?

C’est le cas de la dire, avec 14 mois sans compétition, on ne pouvait qu’à s’attendre à une mise à terre du noble art gabonais.   A l’international, on risquait la suspension et de graves sanctions. Si un pays fait trois ans sans compétition, cela veut dire qu’il n’est pas intéressé par la boxe et on le sanctionne.  Ce qui aurait été plus grave pour nos pugilistes. D’ailleurs, il y avait quatre gabonais au classement africain. Junior Mikamou, le meilleur d’entre eux, était classé 4ème africain et 8èmemondial, dans sa catégorie. Après un an sans compétition, il risque de sortir de ce classement.

L’Etat gabonais décaisse chaque année un budget pour organiser les compétitions. A-t-il honoré ses engagements ?

Je n’en sais rien. Ce que je sais, Alfred Bongo avait dit aux présidents de ligue qu’il pouvait organiser les compétitions sans attendre le financement de l’Etat. Il les avait séduits en leur promettant qu’il pouvait préfinancer les compétitions comme le faisait l’ancien président de la Fégaboxe, Maître Sossa Simawango Clément, mais où le remboursement demeure parfois hypothétique.

Quel est votre mot de fin ?

Les présidents de ligue m’ont confié une lourde et exaltante tâche. Ce à quoi je m’attele. Le plus important pour moi c’est que la famille du noble art soit réunie autour d’une même idélogie et que notre sport d’identification qu’est la boxe retrouve sa lettre de noblesse en commençant par l’organisation d’une élection libre, transparente et crédible, qui sera supervisée par les autorités de la Confédération africaine de boxe.

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William Tambwe
William Tambwe, chroniqueur et éditorialiste pour Africtelegraph.

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