Six jours après le vote, les Kenyans attendent toujours les résultats de la présidentielle 2022. Cette attente, plus longue que prévue, fait craindre un échauffement des esprits et des violences à l’annonce des chiffres définitifs, qui devrait intervenir d’ici ce mardi 16 août. Les accusations de fraude se multiplient d’ailleurs, alors que différentes personnalités et organisations appellent à la patience et au calme.
Au Kenya, le dépouillement des bulletins de la présidentielle de 2022 se poursuit depuis le mardi 9 août, jour du vote. Cela fait donc six jours que les résultats sont attendus par les 22,1 millions d’électeurs kenyans (taux de participation d’environ 65%, contre 78% en août 2017). La Commission électorale (IEBC) a reconnu ce weekend que le décompte bulletins n’allait « pas aussi vite » que prévu. Elle explique que ses agents ont dû collecter les résultats de plus de 46.000 bureaux de vote, avant de se mettre à vérifier les procès-verbaux physiques et de les comparer avec les fichiers électroniques. Ce lundi matin, elle avait vérifié les bulletins de 80% des 292 circonscriptions que compte le pays.
La tension au siège de la Commission électorale
D’après un décompte provisoire de Daily Nation, le plus important quotidien du pays qui cite des données officielles, le vice-président William Ruto récolterait à ce stade 51,25% des voix, contre 48,09% pour Raila Odinga, vétéran de l’opposition aujourd’hui soutenu par le président sortant Uhuru Kenyatta. D’autres individus avancent toutefois des chiffres en faveur de M. Odinga, mais principalement sur les réseaux sociaux. Une contradictoire qui augmente la suspicion chez les électeurs et le risque de contestation comme lors des élections locales de 2017. Elle fait surtout craindre des violences à l’annonce des chiffres définitifs. La tension serait déjà palpable dans certains quartiers, depuis qu’un incident a eu lieu au siège de la Commission électorale kényane aux Bomas. La police anti-émeute avait dû intervenir le soir du samedi 13 août pour séparer les représentants des différents candidats en désaccord sur le processus de décompte.
Le spectre des violences de de 2007-2008
En attendant les résultats, certains commerces ont préféré fermé, notamment à Kisumu, fief de Raila Odinga. Les opérateurs économiques redoudent de nouvelles violences post-électorales meurtrières, après celles de 2007-2008. Leurs inquiétudes sont partagées par la communuauté internationale, qui appelle à la patience et au calme. En mars déjà, les États-Unis -partenaire clé du pays- avaient alerté sur les conséquences économiques et sociales de violences politiques au Kenya. Face au climat anxiogène actuelle, une quinzaine d’associations, de syndicats et ONG kényanes, ainsi que des intellectuels ont publié dimanche matin, une déclaration commune pour appeler à la retenue. Ils se disent déçus de « l’attitude des politiciens » qui font semblant d’ignorer que « lors d’une élection, il faut être prêt à être soit le gagnant soit un perdant ».
Possibilité d’un second tour historique
Les auteurs de la tribune appellent surtout les Kenyans à ne pas suivre ces gens-là car ils passeront, pas le pays. Une façon de les responsabiliser et d’incriminer les candidats. Comme pour se ressaisir, les deux principaux accusés ont fait des gestes d’apaisement ce dimanche. Au cours d’un service religieux à Eldoret (vallée du Rift), son bastion, William Ruto a invité ses militants à s’inscrire dans une suite pacifique du processus électoral. Raila Odinga, lui, a fait une apparition dans une église à Nairobi. Il a prié pour devenir un instrument de paix et d’espoir pour son pays. L’IEBC devrait annoncer les résultats finaux d’ici le mardi 16 août. Si aucun des quatre candidats ne recueille plus de 50 % des voix, il y aura un second. Ce sera alors une première au Kenya.
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