L’Expert indépendant sur la situation des droits de l’homme au Mali, Suliman Baldo s’est dit vivement préoccupé par la détérioration de la situation des droits de l’homme provoquée par l’insécurité dans le nord et le centre du pays.
Au terme de sa septième visite au Mali, du 7 au 16 novembre, M. Baldo a appelé les signataires de l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali, issue du processus d’Alger à « redoubler d’efforts pour que démarrent les mesures de cantonnement et de désarmement des combattants et pour accélérer la mise en œuvre de cet Accord.»
« Cette insécurité grandissante, attribuable en grande partie aux retards enregistrés dans la mise en application de l’Accord, aux défections au sein des groupes armés signataires et à l’émergence des nouveaux acteurs armés, met en péril les populations civiles dans les régions touchées en restreignant leurs moyens de survie, leur accès aux services de base et à l’aide humanitaire », a-t-il indiqué. « Les groupes violents extrémistes, ont aussi multiplié les attaques meurtrières contre les civils, les FAMA et les forces internationales.»
« A Goundam, tous mes interlocuteurs, y compris les autorités locales, se sont plaints de cas de vols à main armée et d’extorsion aux postes de contrôle mis en place par des groupes armés sur les axes routiers de la région de Tombouctou. Certains usagers de ces axes routiers ont été tués ou gravement blessés lors de ces contrôles. Les populations vivent dans la peur.»
L’Expert indépendant a rencontré plusieurs associations de victimes et les principaux acteurs du secteur de la justice pénale et transitionnelle. « Il est évident que peu de progrès ont été enregistrés dans le traitement judicaire des dossiers de crimes graves commis pendant la crise de 2012/2013. En particulier, les 113 victimes d’abus sexuels qui avaient portés plainte devant les instances judiciaires attendent toujours que justice soit faite.»
«J’ai aussi rencontré des femmes victimes de violence sexuelle et basée sur le genre qui ne sont pas en mesure d’assurer leur prise en charge psychologique, médicale, économique et juridique faute de moyens », a ajouté l’expert indépendant. « Les risques de violences sexuelles restent élevés en l’absence de programmes de protection.»
M. Baldo a néanmoins salué les actions entreprises par les autorités depuis sa dernière visite en février en vue d’améliorer la situation des droits de l’homme, notamment : la réinstallation progressive de l’autorité de l’Etat dans plusieurs zones touchées par le conflit, et la réforme de la Commission Nationale des Droits de l’Homme, conformément aux normes internationales. L’annonce du procès de Capitaine Haya Sanogo et d’autres individus présumés impliqués dans la mort des Bérets Rouges en 2012, qui se tiendra fin novembre, constitue un autre pas important dans la lutte contre l’impunité et la restauration de l’état de droit.
M. Baldo a noté avec satisfaction la diligence dans la mise en place de la Commission Vérité, Justice et Réconciliation. Pourtant, il a souhaité que la CVJR fasse plus d’efforts en matière de communication envers la population, et mène des concertations plus approfondies avec les associations de victimes dans le pays.
L’expert a conclu sa visite en réitérant l’appel à la communauté internationale et aux agences des Nations Unies à redoubler leurs efforts pour aider le Mali à surmonter les obstacles persistants à la lutte contre l’impunité et à la protection des civils dans le pays.
Au cours de sa visite de dix jours, M. Baldo a rencontré le ministre de la justice et des droits de l’homme, Madame la ministre de la promotion de la femme, de la famille et de l’enfant, le ministre de la défense et des anciens combattants et d’autres membres du Gouvernement malien. Il s’est également entretenu avec des représentants de la société civile, y compris des associations de victimes, avec les représentants des mouvements armés signataires de l’Accord de paix, et avec les officiels du corps diplomatique et des agences du système des Nations Unies.
L’Expert indépendant présentera un rapport sur la situation des droits de l’homme au Mali au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies en mars 2017.
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